Radieso : Chlorure de Sodome

Par Endemoniada

[Jingle] RadiEsoooo oh oh… On est à l’antenne là ? Ah bon fallait le dire, j’ai pas vu la lumière rouge s’allumer. C’est à une heure inhabituelle que nous diffusons ce quatrième volet de « Questions pour un champignon », une émission proposée par le service des spores. Comme nous en assurent les tests d’audimat réalisés à votre insu, ce rendez-vous hebdomadaire est déjà bien ancré dans vos mœurs.

A ce propos, un carré blanc s’affichera au bas de l’écran de votre radio car c’est de mœurs tortueuses dont il sera question ce soir. Nous vous invitons à éloigner les plus jeunes du récepteur en regard du caractère ambigu du sujet que nous pénètrerons de notre sagacité.

Sans plus attendre, voici la question qui nous a été soumise par Gérard, l’époux de Mauricette, qui vient juste de sortir de l’hôpital après avoir été mordu par un Tatzelwurm lors de ses vacances en Suisse : « Pour son anniversaire, j’ai offert à ma fille Jennifer un boîte du jeu éducatif Le petit chimiste. En consultant la notice, une expérience à base de Chlorure de Sodome me laisse perplexe car je croyais que cette ville avait été détruite pendant la 1ère guerre du golf. Monsieur Le Perse, que pouvez-vous m’apprendre à ce sujet ? ».

Hum… La curiosité qui vous pousse à nous écrire est un sel qui pimenta à l’extrème la vie de l’épouse de Loth, neveu d’Abraham. Celle-ci fut en effet changée en statue de sel, également appelé chlorure de Sodium, par YHVH lors de la destruction des cités impies de Sodome et Gomorrhe situées à proximité de la mer morte et non du golfe persique comme vous le sous-entendez.

L’Eternel, soucieux de devancer les américains dans la pratique des frappes chirurgicales de destruction massive, décide de rayer de la carte les deux lieux de perdition pour l’exemple. Abraham, bon comme le pain, négocie avec le très haut : « Déconne pas, j’ai de la famille là-bas », lui dit-il en substance. Dieu est sensible à sa demande et envoie deux anges à Sodome pour prévenir dix justes que l’expression de son courroux est imminente, Loth fait partie du lot et héberge les divins messagers que le peuple a la ferme intention de plumer.

Lorsque ces derniers lui apprennent que la destruction de la ville n’est qu’une question d’heures, Loth tente de prévenir la population, mais celle-ci a été rendue sourde probablement à cause de ses pratiques onanistes. Les anges, dont un ressemblait étrangement à Monsieur Scott, téléportent le neveu d’Abraham et les siens hors de la ville à l’instant même où une pluie de feu commence à ravager Sodome et Gomorrhe. L’Eternel a intimé l’ordre aux rescapés de ne pas se retourner pour contempler le désastre, mais il sous-estime cruellement la curiosité féminine: La femme de Loth se retourne et est instantanément changée en statue, sale coup pour son régime sans sel.

Tel est le récit qui nous est rapporté par la Genèse ou dans la tradition islamique qui reconnaît en Loth son septième prophète.

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Une étrange statue de sel au bord de la mer morte baptisée La femme de Loth.

Cette histoire dut patienter jusqu’en 1936 pour connaître un second souffle.

Jusqu’alors, différentes missions archéologiques avaient recherché des vestiges des deux villes sans grand succès, tant et si bien qu’on avait fini par douter sérieusement de leur existence. Cette année là, le Professeur Frederick Clapp, un éminent géologue esquisse l’ébauche d’une nouvelle théorie visant à corroborer l’hypothèse de la destruction de Sodome et Gomorrhe par le feu céleste.

Le sous-sol de la région de la Mer Morte où elles auraient été édifiées regorge de substances pétrolifères et de soufre. Selon lui, il aurait suffit d’une secousse sismique pour que ces matières inflammables soient projetées en l’air au travers d’une faille. Un simple feu au niveau du sol aurait pu embraser les particules et déclencher une pluie incandescente.

Cependant, l’accueil que réserve la communauté scientifique à cette théorie sulfureuse est plus que mitigé car sur le terrain, aucune trace des deux cités n’a pu être découverte.

La légende revient sur le devant de la scène archéologique en 1999, des ruines calcinées sont exhumées parallèlement près des villes actuelles de Bab-edh-Dhra et Numeira, exactement dans le périmètre géographique où on localisait Sodome et Gomorrhe. Les analyses des premiers échantillons prélevés sur le terrain créent la stupéfaction et la théorie de Frédérick Clapp sert à nouveau de base pour mener les investigations. Il se pourrait bien qu’il ait vu juste, près de soixante ans avant que la réalité du terrain ne vienne renforcer la crédibilité de ses hypothèses. Les murs des deux cités enfouies, dont les plus hauts pans ne mesurent plus qu’un mètre ont été calcinés… de haut en bas par une chaleur intense ne pouvant être causée par un incendie.

Le CNRS, par l’entremise de Marie-Agnès Courty tente d’aller plus loin, trop loin sans doute de la théorie de Clapp. L’approche de cette géologue suscite encore de nombreuses controverses car elle suppose que c’est une météorite s’étant en partie désagrégée lors de son entrée dans l’atmosphère qui peut être responsable de ce cataclysme localisé. Pour étayer ses arguments, elle estime que la température de 1500 degrés à laquelle ont été soumis les édifices ne peut avoir été générée par le processus avancé par Clapp. Ses détracteurs soulignent que d’une part, il n’y a aucune trace d’impact ni de cratère et que d’autre part, on n’a pas décelé de résidu d’iridium ou de spinelles nickélifères sur les lieux, ce qui est généralement le cas lors de la chute d’un corps céleste.

A l’heure où nous vous parlons, l’archéologie continue de se creuser à la fois les méninges et les sites concernés dans l’espoir de pouvoir valider l’une ou l’autre hypothèse.

Endemoniada 2007

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