La Voyance à la Carte

Par Melmothia & Endemoniada

Comment choisir son consultant

Tandis que les médias ne tarissent pas de conseils pour distinguer la cartomancienne sérieuse de la honte de la confrérie, discutent les tarifs, les horaires et les méthodes, les praticiens de la voyance sont, quant à eux, obligés de se farcir sans mot dire les armadas de boulets qui sonnent à leur porte.

Vous trouvez ça normal ? Amis voyants, réagissons ! À notre tour, posons nos critères et nos exigences ! Voilà pourquoi les Éditions Melmothia présentent en exclusivité : Comment choisir son consultant, un guide destiné à éviter que l’une de vos connaissances ou client ne reparte avec une boule de cristal décalquée sur le crâne ou n’apprenne à ses dépens pourquoi on appelle les cartes du Tarot des lames.

Car je sais que vous aussi, vous rêvez du consultant idéal. Celui qui ne serait ni un sceptique teigneux, ni un illuminé, ni pervers, ni dépressif. Celui qui accepterait de répondre à des questions simples sans vous raconter sa vie depuis sa naissance. Celui qui ne veut pas que sa femme, son patron ou son voisin meure dans d’atroces souffrances. Qui ne s’envoie pas en l’air avec son chien. Qui ne se cure pas le nez avant de vous serrer la main. Un consultant rose et souriant, qui dit bonjour en arrivant et merci en partant. Or, ce spécimen-là est rare. À la place, vous avez droit à un éventail de tares à la fois variées et monotones :

  • L’audition sélective

Quoi que vous disiez, les informations seront déformées par le filtre des désirs et des angoisses. Un quidam à qui vous annoncez un minuscule bobo va se voir hospitalisé, une hésitation sur une carte va le rendre tout blanc, un problème plus important sera reçu comme la promesse d’un suicide… Le consultant préfère généralement la politique du pire. Vive la tragédie grecque.

  • Les faux sceptiques

On les reconnaît facilement, car ils ouvrent toujours le bal par « Oh moi, vous savez, je suis quelqu’un de rationnel ». Ceux-là ne sont pas bien méchants et ne demandent qu’à être convaincus… Le problème, c’est qu’ils le sont généralement assez vite, au point que vous ne savez plus comment les décrocher. Feindre l’évanouissement ou prévoir d’annuler les trois consultations suivantes.

  • Les vrais sceptiques

La plupart sont gérables, mais il en existe des teigneux qui commencent par vous mettre au défi de voir quoi que ce soit, puis font des pieds et des mains pour que la consultation échoue.

– Vous avez trois enfants? Un ange passe.

– Bon, je pense que vous avez trois enfants.

– Non.

Fin de la séance:

– Haha. Vous êtes nulle. J’ai TROIS enfants. Hahaha.

Mention spéciale pour celui qui répète « ah, moi j’dis rien » en ricanant et en boucle pendant toute la séance.

  • L’enthousiaste immodéré

Le contraire du précédent. Le consultant toujours satisfait de vos services même si vous lui annoncez qu’il va aller faire du jet ski sur la lune. C’est aussi énervant.

  • Le routard

Celui-là commence par vous rapporter ce que lui ont dit les quinze cartomanciens consultés la semaine précédente, récit assorti de commentaires et d’évaluations. Le guide Gault et Millau des officines de voyance, en quelque sorte. Quoiqu’il arrive, il reviendra. De toute façon, il passe sa vie à ça.

  • Le pilier de cabinet

Du même genre que le précédent, mais c’est vous qu’il a choisi.

  • Le salaud

Sa vie est un enfer. Les gens sont tellement méchants… Vous prenez combien pour un envoûtement?

  • Monsieur ou Madame Dusse

Il/elle passe sa vie à chercher le grand amour. De préférence n’importe comment et n’importe où. Celui/celle-là vous appelle en catastrophe à trois heures du matin pour savoir s’il/elle va conclure avec le quidam croisé la veille sur le parking de la boîte de nuit.

  • Le type Calimero

Ça ne va pas. Mais alors pas du tout. D’ailleurs ça ne va jamais. Prévoir la réserve de Kleenex sur le bureau et quelques heures de battement pour entendre le récit de son enfance difficile.

  • Celui qui a le ‘don’

… Et vous fait une voyance. Grand seigneur, il ne vous demandera pas de le payer. Par contre, il sait tout mieux que vous.

  • Le dépendant

Il vous prend pour Dieu et attend que vous résolviez tous ses problèmes, persuadé que vous devez savoir pourquoi il est né et comment réparer sa cafetière. Comme vous n’avez pas toutes les réponses, il finit par vous détester.

  • Le « cartothanatophobe » :

C’est celui qui change de couleur quand « la lame sans nom » apparaît, vous avez beau le rassurer en lui expliquant que dans ce contexte là, c’est plutôt bénéfique, rien n’y fait. En sortant chez vous, il prend rendez-vous avec les pompes funèbres.

  • Le réincarné

Si vous cherchez une solution à ses problèmes, montez dans la machine d’HG Wells en direction du passé. Sa femme l’a quitté ? C’est normal, quand il était pharaon, il a renié son épouse et maintenant, ce n’est qu’un juste retour de manivelle.

  • Le puceau

Pour lui, c’est comme pour Jeanne Mas, c’est la toute première fois. Vous aurez beau essayer de capter son attention, il passera le plus clair de son temps à observer le moindre de détail de la pièce ; des voyants, il en a vu à la télé, mais jamais d’aussi près.

  • Le copain du consultant

Celui-là, il est redoutable. Cela fait plusieurs fois que son meilleur ami vient vous voir et ce dernier ne tarit pas d’éloges à votre sujet. Il a donc décidé de franchir le pas à son tour. Rapidement, il s’offusque que vous ne lui prédisiez pas un futur aussi rose que celui de son copain : « Pourquoi à lui vous lui avez dit ça et à moi vous m’annoncez le contraire ? »

  • Le « décorumiste »

Spécimen plus rare que l’on ne rencontre que dans le cadre de festivals ou salons de la voyance. Il commence d’abord par décrire des spirales autour des tables des différents praticiens avant de décider sur lequel il va orienter son choix, ça peut durer des heures. Plus votre dégaine sera proche de celle de Mme Irma, une chouette sur l’épaule étant un gage de sérieux à ses yeux ou plus votre nom d’emprunt professionnel comportera de particules, plus vous aurez de chances qu’il vous choisisse. Si vous avez décidé de vous appeler « Roland Durandal » ou « Paul des Templiers » (que je salue au passage s’ils nous écoutent) vous avez toutes vos chances de vous farcir ce type de consultant.

  • L’amnésique chronique

Il hoche la tête en permanence comme un chien sur la plage arrière d’un véhicule. Vous croyez qu’il comprend tout ce que vous racontez, mais ô surprise, au terme de la consultation, il vous demande de répéter depuis le début.

Endemoniada & Melmothia 2007

Commentaires 2

  • Formidable ! Je les ai tous connu et même plusieurs cas en un seul 😀

    Il y a aussi la « détective » qui a couvert mon guéridon de photos de ses connaissances pour que je parle (en mal bien sûr) d’elles …

  • C’est drôle, mais c’est pas drôle !
    En tant que consultante potentielle, je vais plus jamais plus oser aller voir une voyante après un article pareil !
    Il faut dire que je n’y suis allée qu’une fois dans ma vie. La cause ; j’ai la conviction maintenant que c’est moi seule qui construis mon avenir en fonction de mes choix présents.
    Nous sommes la somme de nos choix.
    Notre avenir ne peut être décelé que si nous sommes une personne sans surprise.

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