Le Principe de Toute Chose

Par Melmothia

« Toutes choses sont composées de quatre principes élémentaires : le chaud, le froid, l’humide et le sec. Ce sont là les éléments de tout ce qui existe ; c’est par leur combinaison que toutes choses sont formées ».

Pseudo-Apollonius de Tyane, Le livre du Secret de la Création.

Soit que la question les a réellement obsédés, soit que la postérité n’a conservé d’eux que cet acte de bravoure, les philosophes présocratiques sont célèbres pour avoir essayé de deviner l’essence de l’univers, ou si vous préférez la materia prima à l’origine de tout le reste. Pour résoudre l’énigme, chacun y va de son élément. Héraclite pense que le feu pourrait bien être à la source de tout, Anaximène y verrait plutôt l’air, pour Thalès, ce sera l’eau, puis c’est au tour d’Empédocle, au début du Ve siècle avant notre ère, de postuler que le feu, l’eau, la terre et l’air se serrent les coudes pour composer l’univers. Et voilà, plus d’jaloux. Malgré la concurrence, notamment celle de Démocrite qui pense que la matière pourrait être bien être constituée de trucs tout petits tournant dans le vide [1], la théorie des quatre éléments va passer à la postérité. Reprise par Platon, puis Aristote, elle inspirera à la médecine sa doctrine des humeurs, gagnera à sa cause l’astronomie, la physique, la philosophie & tandis qu’elle est passée de mode en science, nos modernes ésotériciens continuent d’ajouter des saveurs élémentales dans tous leurs exposés en son honneur. Pourquoi un tel succès ? Chez les historiens des sciences, la théorie est couramment présentée comme une simple fausse note dans la symphonie du progrès. Si Empédocle n’avait pas ramené ses 4 éléments, peut-être que Démocrite, leur poulain à posteriori, aurait eu plus de suffrages dans la pensée grecque. La galerie d’ancêtres aurait eu meilleure figure. Mais voilà, Empédocle est passé par là, et surtout, malgré ce que répètent les manuels, sa théorie n’est pas une simple erreur d’aiguillage d’une vingtaine de siècles, si elle a bénéficié d’autant de crédit, c’est qu’elle a séduit son monde par ses implications mystiques, implications qui flottent toujours dans l’air dès lors que l’on passe la porte de l’ésotérisme.

1. Empédocle d’Agrigente (-484 à -424 environ)

Empédocle d’Agrigente est un disciple de Pythagore. Qu’il se soit fait éjecter à coups de pieds de l’école du maître pour une histoire de vol de discours est un détail. D’ailleurs ne dit-il pas lui-même que tout est mélange et qu’aucune génération de substance n’est possible? Il applique son postulat à la lettre : il touille. Chez Pythagore, il prend la manie du quaternaire de même que cette conviction que le monde est cosmos, c’est-à-dire ordonné. A Parménide, il emprunte l’immance. Ces 4 principes, qu’Empédocle appelle « les racines de toutes choses », le terme éléments n’apparaîssant que plus tard, chez Platon, sont qualitativement immuables, de toute éternité, et ils occupent tout l’espace. Tandis que Démocrite discourt sur le rien qui entoure les particules, Empédocle refuse par principe les trous du gruyère. L’idée de bouts de matière tournoyant dans le vide plus ou moins au hasard, lui déplaît considérablement. Les constituants de la matière sont incréés, impérissables et ils remplissent tout. Voilà. Et pour être bien sûr que ses éléments-racines ne soient pas confondus avec de vulgaires sacs de sable ou une bouteille de Badoit, il les associe à des divinités : Le feu sera Zeus, la terre Héra, l’eau Nestis et l’air Aïdoné.

« Apprends d’abord les quatre racines de toutes choses, Zeus le luminescent, Héra porteuse de vie, puis Aidoneus et Nestis enfin qui nourrit les mortels par ses larmes.

… Non-engendrés.

Je te dirai encore: il n’y a de naissance pour personne parmi tous les mortels et pas non plus de fin en relation avec la mort pernicieuse, mais seulement mixtion puis réconciliation de ce qui a été mélangé. En ce qui concerne les hommes, on parle de naissance » [2].

Cependant, il faut bien rendre compte du caractère changeant du monde terrestre, Empédocle va donc invoquer des lois d’affinités et d’inimitiés entre les choses. Si les 4 racines ne se modifient en rien, par contre elles se réunissent ou se séparent sous l’influence de forces cosmiques, le duo Amour et Haine : « Aucun de ces échanges continus ne cessent, Tantôt sous l’effet de l’Amour, tout converge vers l’Un, Tantôt au contraire chaque chose est emmenée séparément par la haine de Discorde » [3].

Au Veme siècle, la théorie des quatre racines est encore une hypothèse parmi d’autres, qui vaut bien celle de Thalès où l’on apprend que la terre est une bulle posée sur un immense océan ou celle d’Héraclite postulant une guerre totale de la matière, appuyée sur le feu. Sur celles-là cependant, elle a l’avantage du quaternaire, un nombre qui marque des points au box office mystique notamment grâce à Pythagore, et celui de fournir une explication unificatrice du monde assaisonnée d’immanence. Ainsi que l’écrit Jean-Pierre Riffard : « Empédocle est une synthèse. Il résume l’ésotérisme passé, en intégrant dans sa pensée les Mystères, Pythagore, Héraclite; il annonce le futur en donnant, en quelques vers, les bases de la pensée ésotérique » [4]. Mais si on y trouve en germe tout ce qui fera plus tard les joies de l’ésotérisme, à savoir l’idée d’un monde ordonné, d’essences communes à toutes les manifestations, les lois d’affinités et de sympathies, et même le panpsychisme (« Toute chose a conscience et part à la pensée », nous dit Empédocle), son plus grand mérite sera de séduire les philosophes de la génération suivante, Platon et Aristote, qui vont la faire passer à la postérité en la modifiant quelque peu.

2. Platon (-427 à -347 environ)

La théorie d’Empédocle sera d’abord récupérée par Platon qui nous expose sa cosmogonie dans le Timée : Le Démiurge aurait créé l’univers à partir des 4 éléments puis l’aurait doté d’une âme pour mouvoir le tout:

« Le Dieu a disposé ces éléments les uns à l’égard des autres, autant qu’il était possible dans le même rapport, de telle sorte que ce que le feu est à l’air, l’air le fût à l’eau, et que ce que l’air est à l’eau, l’eau le fût à la terre. De la sorte, il a uni et façonné un Ciel à la fois visible et tangible » [5].

Il apparie ensuite ces éléments à des polyèdres connus pour leurs propriétés géométriques remarquables, le tétraède, l’icosaèdre, le cube, l’hectaèdre et le dodécaèdre, qui sont dits réguliers car toutes leurs faces sont des polygones réguliers identiques. Pythagore en a lui-même découvert un, le dodécaèdre. Plus tard Euclide démontrera qu’ils sont bien 5 et pas un de plus. C’est néanmoins au nom de Platon que la postérité les associera sous l’appellation de solides de Platon (solide = figure en trois dimensions).

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Le rapprochement est ainsi justifié dans le texte :

« D’abord, que le feu, la terre, l’eau et l’air soient des corps, cela est sans doute évident pour quiconque. Or, l’essence du corps possède aussi toujours l’épaisseur. Mais toute épaisseur enveloppe nécessairement la nature de la surface. Et toute surface de formation rectiligne est composée de triangles » [6].

Laissons à Platon la responsabilité de son argumentation. Contentons-nous de constater qu’une fois de plus plane l’ombre de Pythagore qui nous murmure que tout est nombre, que les choses sensibles possèdent des essences parfaites et abstraites. Le Démiurge de Platon est avant tout un dieu mathématicien.

Les 4 premiers solides seront associés aux 4 éléments. Pour cela, Platon s’appuie sur leur physionomie :

« A la terre attribuons certes la figure cubique. Car la terre est la plus difficile à mouvoir des quatre espèces et c’est de tous les corps le plus tenace. Et il est très nécessaire que ce qui a de telles propriétés ait reçu, en naissant, les bases les plus solides. Or, entre les triangles que nous avons supposés à l’origine, la base formée par des côtés égaux est naturellement plus stable que celle qui est formée par des côtés inégaux. Et la surface équilatère quadrangulaire composée de deux équilatères est nécessairement plus stable, soit dans ses parties, soit dans sa totalité, qu’une surface triangulaire. Par suite, en attribuant cette surface à la terre nous nous conformons à la vraisemblance.

De même en attribuant à l’eau la figure la moins mobile, au feu la plus mobile, et la figure intermédiaire à l’air. Et le corps le plus petit au feu, le plus grand à l’eau, l’intermédiaire à l’air. Et le plus aigu au feu, le second par ce caractère à l’air, et le troisième à l’eau. Ainsi, entre toutes ces figures, celle qui a les bases les plus petites doit avoir forcément la nature la plus mobile: c’est toujours la plus coupante, la plus aiguë de toutes, et en outre la plus légère, puisqu’elle est composée du plus petit nombre des mêmes parties.

Et la seconde doit tenir le second rang en ce qui touche ces mêmes propriétés, et la troisième, le troisième rang. En conséquence, à la fois selon la droite logique et selon la vraisemblance, la figure solide de la pyramide est l’élément et le germe du feu; la seconde selon l’ordre de la naissance, disons que c’est l’élément de l’air et la troisième, celui de l’eau.

Or, toutes ces figures, il convient de les concevoir si petites, que dans chaque genre, aucune ne puisse jamais, à cause de sa petitesse, être perçue par nous individuellement. Au contraire, lorsqu’elles se groupent, les masses qu’elles forment sont visibles.

Et, pour ce qui touche les rapports numériques concernant leur nombre, leurs mouvements et leurs autres propriétés, il faut toujours considérer que le Dieu, dans la mesure où l’être de la nécessité se laissait spontanément persuader, les a partout réalisés de façon exacte et a ainsi harmonisé mathématiquement les éléments » [7].

Quant au cinquième polyèdre, on lui délègue l’univers : « Il restait encore une seule et dernière combinaison; le Dieu s’en est servi pour le Tout, quand il en a dessiné l’arrangement final ». Oui, moi aussi, quand je monte un meuble en kit, il me reste toujours un ou deux boulons.

3. Aristote (-384 à -322)

A son tour, Aristote récupérera la théorie d’Empédocle, mais contrairement au philosophe d’Agrigente, il affirme, comme le faisait déjà Platon, que les éléments peuvent se transmuer. Pour les y aider, il leur postule des qualités. Ainsi le feu et l’air ont en commun d’être « chauds », mais tandis que l’air est « humide », le feu est « sec ».

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Le philosophe nous dit également qu’à l’origine, ces éléments existaient sur des plans séparés: Au centre, la Terre, puis l’Eau, l’Air, et enfin le Feu le plus léger. Dans notre monde, ces quatre plans se sont mélangés. Une hiérarchisation qui a encore son petit succès de nos jours dans le monde ésotérique. Puis, comme lui aussi déteste le vide et vote pour la continuité de la matière, il récupère, toujours chez Platon, un cinquième élément, l’éther, de façon à rendre compte du monde céleste et de l’atmosphère. Contrairement aux 4 éléments du monde terrestre, l’éther ne sera pas associé aux polyèdres. Il demeure « à part » jouant le rôle paradoxal de « matière incarnant le vide » qui fera se gratter longuement la tête aux penseurs suivants.

Voilà notre théorie élémentaire désormais opérationnelle et surtout terriblement séductrice, puisque de simple postulat ontologique, elle s’est transformée, grâce à Aristote en modèle cohérent d’explication du monde.

4. Le Moyen Age

Tandis que Platon et Aristote recyclent Empédocle, de son côté, le futur père de la médecine, Hippocrate (-460 à -370 environ), bidouille également une théorie quaternaire : Le corps humain dépend de quatre principes, sang, phlegme, bile jaune et bile noire dont l’équilibre induit la santé, et le déséquilibre la maladie. Son disciple, Galien, inaugurera le rapprochement entre la théorie des éléments et celle d’Hippocrate, mais sans établir de correspondance stricte. Il faudra attendre la médecine byzantine pour que tout cela s’agrège en une théorie unique où tout correspond parfaitement à tout. Développée et complétée par les médecins arabes, la théorie des humeurs, fusion des idées d’Aristote et de celles d’Hippocrate, revient alors en Occident où elle est érigée en dogme. Grâce à elle, on saigne les malades jusqu’à les faire crever et pour que ça aille plus vite, on leur enfile des laxatifs par l’autre bout. C’est que le Moyen-Age aime Aristote plus que tout au monde. Enfin, un peu moins que Jésus, mais beaucoup quand même… Désormais les tempéraments sont associés aux éléments, aux saisons, aux pathologies, etc. On retrouve le quaternaire partout, en haut, en bas, dans les coins. Et toujours avec cette même idée que tout est bien à sa place grâce à un démiurge calculateur. Si bien que lorsque Képler cherche à comprendre la structure de l’univers, c’est vers les polyèdres réguliers qu’il se tourne. Lui aussi croit en l’harmonie des sphères & au dieu mathématicien. Les intervalles existant entre les orbes des planètes ne sauraient être le fruit du hasard. L’octaèdre s’inscrira donc entre les orbites de Mercure et de Venus, l’icosaèdre entre Venus et la Terre, le dodécaèdre entre la Terre et Mars, le tétraèdre entre Mars et Jupiter, enfin le cube entre Jupiter et Saturne. Dans le Mysterium cosmographicum, il raconte que ses calculs l’ont conduit à voir :

« les solides symétriques s’insérer les uns après les autres avec tant de précision entre les orbites appropriées que si un paysan demandait à quels crochets les cieux sont fixés pour ne pas tomber, il serait facile de lui répondre » [6].

Quant au soleil, à l’espace et autres trucs qui ne bougent pas, il les explique par la Sainte Trinité, et hop le tour est joué.

5. Les trous de l’Elémental

La théorie des éléments va dominer la pensée occidentale pendant près d’une vingtaine de siècles, et ce dans tous les domaines: physique, médecine, psychologie, astronomie, etc. jusqu’à ce qu’au XVIIIeme siècle, la science la relègue enfin au placard. Elle n’aura désormais plus le droit de cité dans la pensée, hormis dans l’ésotérisme où son succès ne décroît pas. Les raisons en sont évidentes : Tout d’abord, aucune théorie moderne ne pourra jamais caresser ses postulats à ce point dans le sens du poil. Le quaternaire élémental est une autoroute conceptuelle pour l’ésotérisme. Si des essences communes unissent en sous-sol les manifestations du monde derrière leurs apparentes divergences, se dessinent alors tous les possibles rêvés en matière de sympathies, influences astrales, minérales, homéopathiques. L’univers peut être quadrillé par le système des correspondances, une chose peut agir sur une autre, on peut transmuer le plomb en or. Ensuite, au contraire de la science, l’ésotérisme aime la marche en crabe, l’ancienneté n’y est jamais synonyme d’anachronisme mais de qualité, à croire qu’on négocie du pinard et non des idées. Se réclamer d’Aristote n’est pas suranné, c’est traditionnel. A la décharge de l’archaïsme, il faut pourtant reconnaître que vingt siècles de pensée élémentale ne s’effacent pas comme ça. A défaut de pouvoir prétendre à la vérité cosmique, notre quaternaire conserve son pouvoir psychologiquement évocateur. Jung, et à sa suite Bachelard convoqueront notre bon vieux quaternaire pour aborder, non le cosmos, mais l’imagination humaine, le premier allant jusqu’à rajeunir la théorie des humeurs pour fonder sa typologie : Sensation/ Sentiment/ Pensée/ Intuition, démarche discutable mais qui a le mérite du lifting. Selon lui, le quaternaire a vocation de réconciliation avec l’inconscient.

Alors que faire de nos quatre éléments ? Les considérer comme des incontournables de la psyché, qui comme le prétend Jung, seraient des opérateurs de pensée, ou comme des stigmates d’un obscurantisme dont il conviendrait enfin de se défaire ? Pour le plaisir de rebondir et de jeter un peu d’encre dans une eau déjà troublée, je laisserai le mot de la fin à Hubert Reeves : « Ce n’est pas un hasard si le nombre quatre est un garant de la stabilité. Les propriétés des particules vont souvent par deux. Il y a deux sortes de nucléons: protons et neutrons ; deux charges électriques (+) et (-), etc. Quand deux fois deux propriétés sont présentes, la stabilité est encore accrue. Le nombre quatre est « magique » pour les physiciens » [7].

Melmothia 2008

[1] Hypothèse faisant de lui, si on réfléchit, le digne inventeur du bidule.

[2] Empédocle, Fragments VII & VIII, traduction de Robin Delisle.

[3] Empédocle, Fragments XVII, traduction de Robin Delisle.

[4] Jean-Pierre Riffard, L’ésotérisme, Robert Laffont, 1991.

[5], [6], [7], Platon, Timée, Traduction Émile Chambry.

[6] Cité dans La musique des sphères de Marc-Lachièze Rey et Jean-Pierre Luminet, Pour la science No 253, novembre 1998.

[7] Patience dans l’azur, Hubert Reeves, Le Seuil, 1981.

Commentaires 2

  • Du point de vue intellectuel cet article est brillant puisqu’il réussit à nous faire comprendre que les philosophes grecs, dont toute notre culture se revendique, ne sont que de grands débiles suffisamment astucieux pour que tous leurs éléves et les 20 générations d’après les aient suivies.

    Ce qui est navrant, par contre, c’est l’incapacité à expliquer le véritable enthousiasme des diverses générations pour ces théories qui vous semblent tellement fumeuses !!Enthousiasme qui revient et s’exprime sous des formes plus variées que les solides de Platon, notamment dans l’étude ésotérique et le mouvement new age.

    Ne serait-il pas interressant pour vous et pour le monde de cesser de railler stupidement et d’essayer d’envisager une nouvelle théorie, où ni l’air, ni l’eau, ni le feu et encore moins l’éther et la terre ne seraient les bases de la vie…..et que cette toute nouvelle théorie dont vous feriez don au monde, soit exploitable pour les cerveaux des générations à venir?

    Voilà une quête digne de votre grande lucidité, de votre imperturbabilité face aux crétineries ordinaires issues de nos cerveaux dégénérés à nous, pauvres mystiques!
    Et pourriez vous la prochaine fois, nous faire un compte rendu sur le Pére Noél, ses origines et l’odieuse obligation que ces fêtes donnent de se retrouver en famille et de s’offrir des cadeaux….aurez-vous la chance de ne pas en ouvrir? Et seront-ils faits d’eau, de terre, d’air et de feu? Mon Dieu, quelle horreur toute cette matière inutile, qui n’explique même pas comment Dieu s’est retrouvé coincé dans l’Homme cette espéce dotée d’insuffisance cérébrale!

    Bon Noél tout de même!!

  • Bonjour,

    Pour commencer, je n’ai jamais dit que les philosophes grecs étaient des crétins, je suis très loin de le penser, mais sans doute que le ton volontairement familier de l’article prête à confusion. Je sais que nous naviguons dans un domaine – l’ésotérisme – où il convient d’habiller les concepts de grands mots et d’emphase sans quoi on se fait rapidement taxer d’irrévérence.
    Pour autant, je ne désirais pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Mon propos est plutôt celui-ci : le modèle des quatre éléments est arbitraire, historiquement datable et obsolète – trois idées qui n’ont rien de « scoops » mais que je m’efforce de rappeler dans l’article. Pourquoi en ai-je après ce modèle particulièrement ? Eh bien, parce qu’il est présenté dans l’ésotérisme comme une vérité intemporelle et indiscutable, souvent accompagné de son cousin « les quatre humeurs ». Or, s’il demeure intéressant d’un point de vue symbolique (par exemple en méditation ou dans la pratique magique), ce modèle n’est en rien dégringolé du ciel ainsi qu’on nous le présente souvent et, comme toujours, l’ésotérisme a quelques siècles de retard sur les autres savoirs. J’ai écrit ce texte après avoir lu un article de médecine holistique s’appuyant sur le fameux schéma « bilieux, sanguin, etc. »… Et pourquoi pas deux silex pour allumer sa cheminée ?

    Concernant l’enthousiasme durable pour ce modèle (autrement dit : un autre modèle aurait pu être élu et conquérir la pensée occidentale, puis orientale ; alors, pourquoi celui-là ?), il me semble pourtant en avoir parlé, mais le sujet demanderait à être approfondi. La raison pourrait en être la suivante : validé par Platon puis revisité par Aristote, les quatre éléments ont séduit parce qu’ils proposent une grille unifiée et cohérente d’explication du monde : l’univers est désormais compréhensible, tout est dans tout, les planètes répondent aux caractères humains, aux plantes, aux métaux, etc. Tout est propre et rien n’est laissé au hasard. Cette conception, qui formera le socle de l’occultisme à la Renaissance, a un gros avantage idéologique : si l’univers est compréhensible, c’est sans doute qu’il a été créé par un Démiurge et qu’il l’a été à mesure humaine (ou pour l’humain). De nos jours, nos scientifiques se tripotent le cerveau avec la théorie unifiée de la matière… S’en sortiront-ils mieux ? Je l’ignore, et pour tout dire, je ne l’espère pas.

    Comprenez-moi bien, je n’ai rien contre l’occultisme & je pense que l’on gagnerait beaucoup à considérer la pensée analogique comme un outil d’appréhension valide dans certains domaines (ce qui n’est pas du tout le cas à notre époque), mais il ne faut pas tout mélanger. Les quatre éléments sur un autel magique ou pour méditer, pourquoi pas (le quaternaire par exemple, a une grosse charge symbolique), mais il ne faut pas être « naïf ». Nous savons désormais que le monde est plus complexe qu’une savante combinaison de feu, terre, eau et air & que saigner des malades pour nettoyer leurs « humeurs » ne donne pas de très bons résultats. Par ailleurs, les fameuses « correspondances » qui en découlent sont bien souvent du « bricolage » et si elles peuvent servir d’outils en Magie ou Mystique, à la façon dont un oracle sert de support en voyance, c’est-à-dire comme modèle arbitraire, elles n’ont pas valeur de vérité et pourraient très bien être remplacées par d’autres.

    Ne m’opposez pas trop violemment, svp, aux mystiques. Vous n’êtes pas sur un site zététique. Pour le père Noël, j’y travaille… ; )

    Joyeuses Fêtes également & merci pour votre intervention.

    Cordialement,

    Mel

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